Notre association défend depuis de nombreuses années l’amélioration des transports en commun en Ile-de-France. Compte tenu du retard pris, nous considérons que la modernisation du réseau existant est prioritaire mais que certaines infrastructures nouvelles doivent aussi être créées. Tout en souhaitant quelques améliorations, notre association a apporté son soutien à la création de la ligne 15 du Grand Paris Express, rocade de zone dense. Mais la ligne 18 entre Orly et Versailles est d’une tout autre nature. Les différents arguments ci-dessous nous conduisent à donner un avis défavorable à sa création.

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Une zone de desserte avec peu d’habitants

Hormis les sites de Massy-Palaiseau et Versailles-Chantiers, déjà bien desservis par les transports en commun et reliés entre eux par le RER C, les gares de la ligne 18 correspondent à des zones d’emplois et des campus où résident très peu d’habitants, comparées aux stations du réseau RATP actuel. Or les déplacements « travail / travail » ne représentent que 3% de l’usage des transports publics. Par ailleurs, les statistiques montrent que les salariés du plateau de Saclay habitent à 70% dans l’Essonne, souvent dans des villes peu denses loin de la ligne 18. Il en résultera un trafic faible, en particulier aux heures creuses, en soirée et le week-end. Il y a si peu de population à desservir qu’une interstation de 9 km est prévue entre « CEA St Aubin » et « Saint-Quentin Est », distance inédite sur un métro.

Un effet de décharge quasi-nul

L’un des objectifs majeurs du réseau du Grand Paris Express est de décharger le réseau existant. S’agissant de la ligne 18, l’effet de décharge du RER B avancé par la SGP est de 5% mais le STIF lui-même indique que cette estimation « semble très élevée » et d’un intérêt très faible puisque la saturation du RER B se situe en proche couronne et dans Paris.
S’agissant du report du trafic automobile vers la ligne 18, il est très modeste puisque la part modale de la voiture dans la zone d’étude ne diminuera que de 0,3% selon l’étude d’impact SGP (pièce G-2).

Un cout très élevé par rapport au trafic attendu

La construction de la ligne 18 est évaluée à 3 milliards d’€, hors matériel roulant pour un trafic estimé à 100 000 voyageurs par jour. S’y ajouteraient les couts d’exploitation (au moins 45 M€ par an). Dans ces conditions, comme le souligne le STIF et le Commissariat général à l’investissement, la rentabilité socio-économique du projet est très faible.


Un financement non garanti

Même si la SGP reçoit chaque année environ 500 M€ de taxes affectées, sa capacité de financement n’est pas illimitée car elle ne pourra pas s’endetter au-delà du raisonnable. Ces derniers mois, elle s’est engagée à financer 500 M€ de surcoûts sur la ligne 15 sud, 500 M€ supplémentaires pour le projet EOLE, et ce n’est pas fini. Par ailleurs, on constate que des projets plus modestes et plus avancés peinent à réunir leur financement (exemple : tram-train Massy / Evry financé à ce jour à hauteur de 77 M€ sur 455 M€). Les contraintes budgétaires ne peuvent donc être passées sous silence.

Des alternatives plus rapides et moins coûteuses
Etant donné qu’aucun point du plateau de Saclay n’est éloigné de plus de 3 km d’une gare existante, la priorité consiste à améliorer les lignes existantes :

 le RER B, dont l’offre pourrait si nécessaire être renforcée au sud de Massy, moyennant certains investissements.

 le RER C, avec d’une part sa transformation en tram-train entre Massy et Evry et l’extension de celui-ci à Versailles, d’autre part la branche qui dessert la zone d’emplois d’Orly/Rungis dont la desserte toutes les 15 minutes (au lieu de 30) nécessite la réalisation urgente du projet « Massy – Valenton » dans sa totalité.
Ces 2 axes structurants peuvent être complétés par des moyens de transport plus légers que le métro :

 Compte tenu des dénivelés importants, la réalisation de transports par câble depuis les gares des vallées se justifie, notamment depuis Orsay « Le Guichet »

 le TCSP entre Massy et Polytechnique, en cours d’extension à Saclay, est compatible avec un passage en mode tramway qui permettrait d’augmenter fortement sa capacité, tout en ayant une desserte plus fine que la ligne 18 dont le faible nombre de gares couvre mal la vaste étendue du plateau.

 Entre Versailles et Satory, la mise en place d’un bus en site propre, déjà envisagée, serait suffisante.

 Entre Massy et le secteur d’Orly / Rungis, outre le RER C renforcé, on peut créer des liaisons par bus plus directes que la ligne 91-10 actuelle, avec si besoin des portions en site propre (déjà étudiées).

Conclusion
Compte tenu de toutes ces faiblesses, le projet de ligne 18 apparait comme un métro de prestige déconnecté des besoins réels de déplacements. L’AUT / FNAUT Ile-de-France souhaite donc que soit rendu un avis défavorable à l’utilité publique de cette ligne et ne fait pas de commentaires sur les détails du projet contenus dans le dossier d’enquête publique.

Pour en savoir plus

 Site officiel de l’enquête publique ligne 18

Avis en PDF
avis_aut_ep_l18_avril2016_vdef.pdf